2023 revue Appareil nº25 : « Vilém Flusser : la technique et les médias à la croisée des disciplines »
Ce numéro de la revue Appareil (laquelle se définit comme voulant « explorer les voies d’une analyse des phénomènes éclairée par l’hypothèse de leur appareillage singulier »), sous la direction de Vincent Jacques et Manola Antonioli, est entièrement consacré à la pensée de Vilém Flusser. Il est titré « Vilém Flusser : la technique et les médias à la croisée des disciplines « . Il regroupe les contributions de neuf chercheurs, basés en France, en Allemagne et au Brésil.
L’appel à contributions avait été publié ici.
Quelques extraits de son Introduction :
« Les textes réunis dans ce dossier explorent la pensée de Flusser dans sa dimension transdisciplinaire : une approche au-delà des frontières des disciplines académiques et une double échelle allant de la microanalyse de dispositifs et appareils jusqu’à une ambition plus philosophique de compréhension systémique et de périodisation historique des relations entre expérience humaine et médiation technique.
Vincent Beaubois (Décomposition de la forme « projet ». Du design du « choc » au design des « programmes ») et Joffrey Paillard (Le dispositif-design : quand la technique devient disciplinaire) proposent une réflexion sur la théorie du design, du point de vue de la notion de projet, et du dispositif-design en milieu urbain, en tant que matérialisation de la société de contrôle dans le mobilier et l’organisation de l’espace.
Flusser ayant questionné la situation révolutionnaire qui nous a fait passer des images d’avant la modernité à des images produites par les techniques, et ayant alors comparé l’effet civilisationnel de l’invention de la photographie à celui produit par l’invention de l’écriture, Ludovic Bernhardt (L’écriture après l’écriture : Öyvind Fahlström, au prisme de la pensée de Vilém Flusser) a recours à la pensée de l’écriture et de l’ère de la post-écriture de Flusser pour analyser les procédés artistiques et graphiques du peintre, écrivain et poète suédois Öyvind Fahlström.
Au sujet de l’univers flussérien de l’image technique, Luciana Nacif (Vilém Flusser : au croisement de l’image technique et de la mode) s’intéresse aux dispositifs qui croisent l’image et la mode, et Vincent Jacques (Qu’est-ce qu’une techno-image ? Vilém Flusser, les appareils et la question de l’automatisation) aborde la question du déterminisme technique chez Flusser en analysant en détails les concepts d’image technique (techno-image) et d’appareil.
Charlotte Bolwin (Esquisse d’une théorie onto-esthétique des médias. La philosophie des images techniques de Flusser) retrace les étapes de l’évolution de l’image technique théorisées par Flusser afin d’esquisser les contours d’une philosophie des relations entre la perception humaine et la machine [traduction depuis l’allemand par Marion Biet].
Jean-Paul Fourmentraux (Oeil pour oeil : l’art contre la technopolice. Autour de Paolo Cirio, Capture, 2020) analyse le travail de l’artiste italien Paolo Cirio, se situant dans la perspective des surveillance studies, afin de montrer l’ambivalence des images et leur pouvoir de contourner l’emprise de la vidéo-surveillance dans la société contemporaine.
Manola Antonioli (Entre nature et culture) explore la réflexion de Flusser sur la dialectique entre nature et culture, entre une technique qui emprunte à la nature certains de ses modèles et une nature qui a toujours une forte dimension culturelle en tant que projet et information, mythe et fiction.
Enfin, la contribution de Jacinto Lageira (Vers une post-histoire superficielle) analyse la théorie de la « post-histoire » de Flusser, en la situant dans la philosophie de l’histoire d’autres penseurs (Kojève lecteur de Hegel et Heidegger).
Avec l’ensemble de ces contributions, nous souhaitons participer à l’intérêt renouvelé pour la pensée de Flusser dans le contexte français, à l’heure où les textes de cet auteur complexe sont encore en cours de traduction. À une époque où l’on questionne de plus en plus l’emprise des techniques sur la production de subjectivité individuelle et collective et leur caractère ambivalent et « pharmacologique », cette pensée se révèle comme une aide précieuse dans une démarche « techno-critique ». Il s’agit de penser tout à la fois les formes d’assujettissement, de contrôle et de surveillance produites par les appareils du monde contemporain et les perspectives créatrices qu’ils peuvent ouvrir afin d’éviter que chacun ne devienne, comme le craint Flusser, un simple « fonctionnaire » au service des machines. »
Laisser un commentaire